Depuis le 1er février, l'Assemblée nationale examine le projet de loi « confortant le respect des principes de la République ». Auparavant appelé loi contre les « séparatismes », le texte inquiète les différents responsables religieux.
Le projet de loi « confortant le respect des principes de la République »
Le projet de loi contient à ce stade une cinquantaine d'articles qui rappellent la neutralité des services publics et la laïcité en France, et veulent lutter contre l'apologie du terrorisme, la haine en ligne, l'instruction à domicile détournée par des familles radicalisées ou encore placer sous contrôle les associations (cultuelles et subventionnées).
Dans l'exposé des motifs, le texte manifeste la volonté du gouvernement actuel de faire barrage à « un entrisme communautariste, insidieux mais puissant, [qui] gangrène lentement les fondements de notre société dans certains territoires. Cet entrisme est pour l’essentiel d’inspiration islamiste. »
De nombreuses oppositions du côté des cultes
« Ce qui nous gêne, c’est qu’on a le sentiment que les croyants sont des citoyens dont il faudrait se méfier. C'est contraire à ce qui nous avez été annoncé au mois d’octobre », a déclaré le président de la Conférence des évêques de France (CEF), qui dénonce des « mesures répressives ».
Devant la Commission des Lois au Sénat ce mercredi 3 février, il a marqué notamment son opposition à l'article 27 qui oblige les associations cultuelles à s’enregistrer auprès de la préfecture. Cette démarche d'autorisation nécessaire pour organiser le culte devra être renouvelée tous les cinq ans. Cette mesure pourrait ainsi affecter la centaine d’associations diocésaines qui existent en France.
Mgr Éric de Moulins-Beaufort a également mis en cause diverses mesures qui introduisent suspicion et contrôle envers toutes les associations, sans pour autant susciter un changement de climat vis-à-vis des principes républicains. Lesdits principes ne sont d'ailleurs pas détaillés dans le texte.
Projet de loi confortant les principes de la République : suivez l'audition de Mgr de Moulins-Beaufort par la commission des lois https://t.co/02iKU75dMz
Cette loi est-elle nécessaire ? C'est la question que pose le cardinal Pietro Parolin. Dans un récent entretien exclusif à KTO, le Secrétaire d'État du Saint-Siège est sorti de l'habituelle réserve diplomatique que le Vatican s'applique envers les processus législatifs des différents pays. Son propos en est d'autant plus fort. Le numéro 2 du Saint-Siège reconnaît « le problème de l’islam radical » en France et le bien-fondé de trouver une réponse. Mais « le fait d’y répondre par une loi (...) risque de mettre en cause des équilibres qui se sont mis en place au cours du siècle, quasiment depuis 1905, depuis la loi de séparation. Et il risque aussi de toucher toutes les religions ».
Au sein de l'Église catholique en France, la remise en cause des équilibres de la loi de 1905 suscite aussi une inquiétude qu'exprime Mgr Bruno Valentin sur Twitter : « C'est parce que la loi actuellement en discussion nous fait passer d'une laïcité de liberté à une laïcité du soupçon, quoi qu'en disent ses promoteurs, qu'elle doit nous inquiéter. »
Parmi les nombreuses réactions sur KTO, le père Cédric Burgun, vice-doyen de la Faculté de droit canonique de l'Institut Catholique de Paris, invite à la réflexion concernant le glissement qu'opère ce projet de loi. Dans sa chronique, il souligne que « le régime associatif risque d’être soumis à l’acceptation d’un pacte républicain. Or, on peut regretter que le principe de laïcité devienne de plus en plus une valeur de la République plus qu’un principe légal, législatif, de stricte séparation entre l’Etat et les religions. »
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