La « guerre juste » est-elle encore d’actualité ? Remise en cause, contestée, le pape François a affirmé ne plus soutenir le principe de guerre juste dans son encyclique Fratelli Tutti. Pourquoi cette évolution ? Quel impact face aux nouvelles réalités des conflits hybrides, tant en Ukraine qu'en Afrique ou au Moyen-Orient ?
Pour prendre conscience des enjeux, la rédaction de KTO met la guerre juste en débat, vendredi 11 novembre à 20h35.
La guerre juste, en débat ce vendredi 11 novembre à 20h35
Un débat entre :
• Général Benoît Durieux, Directeur de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) et de l'Enseignement militaire supérieur
• Mgr Antoine de Romanet, évêque aux Armées françaises
L'émission est animée par Étienne Loraillère.
La notion de « guerre juste » est-elle encore d’actualité ?
La notion de « guerre juste » est issue des traditions romaine et chrétienne. Pétrie d’éléments théologiques, canoniques, juridiques et politiques, la « guerre juste » est née pour encadrer la guerre. De l’entrée en guerre (jus ad bellum), à la conduite de la guerre (jus in bello), jusqu’à la sortie de la guerre (jus post bellum), la guerre juste était un indispensable pour réguler les excès des conflits armés.
Avec les théoriciens de la guerre juste comme saint Augustin, saint Thomas d’Aquin, Grotius, jusqu’à l’Américain Michael Walzer, le concept de guerre juste n’a cessé d’évoluer et de se préciser. Le principe de la guerre juste est composé de critères permettant de poser des limites à la guerre et à ses effets.
Pourtant, la guerre juste a reçu une nouvelle actualité au XXe siècle. Si la Charte des Nations Unies reconnaît un « droit naturel de légitime défense », l’Église catholique prend peu à peu ses distances avec le principe. Dans la constitution pastorale Gaudium et Spes, l’Église catholique considère la guerre comme « un crime contre Dieu et contre l’homme lui-même ». Faut-il encadrer la guerre par le principe de la guerre juste, ou au contraire mettre la guerre hors-jeu en refusant ce principe ? Le dilemme grandit. Le magistère de l’Église catholique y fait de moins en moins référence et le pape François ne soutient plus la guerre juste. Dans son encyclique Fratelli Tutti, le pape François affirme dans le n°258 qu’« il est très difficile aujourd’hui de défendre les critères rationnels, mûris en d’autres temps, pour parler d’une possible “guerre juste”. Jamais plus la guerre ! ».
La guerre n’est plus uniquement armée. Son visage a évolué. Elle est aujourd’hui économique et financière, diplomatique, culturelle… La guerre d’influence a remplacé la guerre strictement militaire. Le pape dénonce le principe de guerre juste pour développer la fraternité universelle et le bien. Dans ces circonstances, que faut-il gagner : la guerre ou la paix ?
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Lettre encyclique Fratelli Tutti du pape François sur la fraternité et l’amitié sociale, 3 octobre 2020.
N°258 (extrait) : Le problème, c’est que depuis le développement des armes nucléaires, chimiques ou biologiques, sans oublier les possibilités énormes et croissantes qu’offrent les nouvelles technologies, la guerre a acquis un pouvoir destructif incontrôlé qui affecte beaucoup de victimes civiles innocentes [...]. Face à cette réalité, il est très difficile aujourd’hui de défendre les critères rationnels, mûris en d’autres temps, pour parler d’une possible “guerre juste”. Jamais plus la guerre !
